Rupture de l’équilibre relationnel du sujet avec lui-même et son environnement, la crise suicidaire est une période où le suicide s'impose progressivement comme une solution possible pour apaiser les souffrances psychiques.
La personne est en état de grande vulnérabilité, de souffrance et de rupture, sans que cela soit toujours apparent.
En moyenne la crise suicidaire évolue sur 6 à 8 semaines, parfois plus courte chez certaines personnes, influencé par l'impulsivité ou la présence de troubles de personnalité.
Plusieurs étapes peuvent être décrites, chacune avec des caractéristiques importantes à reconnâitre afin d'aider à l'organisation de l'intervention la plus adaptée.
A tout moment le processus suicidaire peut être interrompu, soit de façon spontanée par le sujet, soit par l'intervention d'aide extérieure. De nombreuses personnes consultent et demandent de l'aide de façon plus ou moins explicite jusqu'au dernier moment. Il est important de savoir détectée cette demande.
Même lorsque tout paraît organisé pour une issue fatale, une main tendue peut inverser le processus, permettre de chercher des solutions de protection et d'aide et ainsi obtenir la résolution de la crise.
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Les causes sont multiples, il ne peut donc y avoir de solution unique.
La prévention du suicide implique une politique de petits progrès où chacun dans la collectivité peut être acteur.
La reconnaissance de la crise suicidaire permet de proposer le plus tôt possible une aide adaptée. Une intervention extérieure permettant le recours à une solution possible peut suspendre voire arrêter le processus suicidaire.
Pour cela il est nécessaire de reconnaître la crise et de savoir évaluer les trois dimensions qui compose sa morbidité : le risque suicidaire, l’imminence du passage à l’acte et la létalité du moyen disponible.
La formation à la prévention du suicide a pour objectifs que tous les intervenants dans la chaîne de prévention puisse disposer de cet outil d’évaluation.
La prévention primaire relève de programmes de développement de l'estime de soi et d'une meilleure gestion des émotions. Ils sont faciles à appliquer dans le cadre scolaire et répondent bien aux difficultés des jeunes.
L’amélioration de la protection et le renforcement de la résilience est important chez les personnes vulnérables.
De même la prévention de l’intimidation et de la violence peut avoir un impact sur la dangerosité et le cadre scolaire est favorable à ce type d'actions.
L’alcoolisme étant reconnu comme facteur de risque suicidaire, le développement de sa prévention participera indirectement à celle du suicide. L’intensification des soins est bien entendu aussi à renforcer.
La prévention secondaire repose sur une meilleure détection des personnes et situation à risque et d’une orientation en amont des gestes suicidaires.
La diffusion de l'information et des outils de détection sur les structures de soins adaptées ainsi qu'une meilleure lisibilité des circuits de soins font partie des objectifs actuels de la réorganisation hospitalière.
De même, et quel que soit l’âge, des professionnels de santé formés à l’évaluation suicidaire doivent pouvoir proposer les soins nécessaires.
Des consultations adaptées aux besoins sont à développer. Les équipes permettant des interventions de crise, un des pivots de la prévention secondaire, sont insuffisantes à ce jour.
La chaîne de prévention repose sur les permanences téléphoniques fonctionnant 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Ceci oblige à un standard de qualité et au développement de la supervision clinique des intervenants
La prévention tertiaire implique la prise en compte des risque de récidives en étant plus attentifs sur les périodes et situation à risque. Des protocoles de suivi rapproché peuvent être mis en place à partir des hôpitaux psychiatriques et des services d’urgences et de crise en psychiatrie lors des sorties. La médecine du travail peut accompagner des politiques plus humaines dans les entreprises autour des conditions de licenciements. L’Etat doit conforter sa politique sociale dans le contexte d’instabilité actuel. Les efforts pour la réduction de l’accès aux moyens doivent être poursuivis.
Une autre piste est la mise en place de procédures de suivi des patients sortant des institutions psychiatriques ou quittant l’hôpital juste après une tentative de suicide. Ces périodes sont en effet décrites comme à risque.
Ceci doit s'articuler avec un meilleur soin des troubles mentaux, indispensable. En effet, les troubles mentaux touchent environ 12.000.000 de personnes. Selon leur nature, le risque suicidaire qui y est associé est de 5 à 40 fois supérieur à celui de la population générale.
Les études post-mortem font apparaître un trouble psychiatrique chez plus de 90% des suicidés, la dépression étant prévalente.
Il est donc indispensable d’améliorer la détection du risque suicidaire auprès de ces personnes en améliorant la formation du personnel soignant.
Une amélioration d'une attention vigilante particulièrement dans les périodes à risque est aussi nécessaire. De même les informer des risques et des aides existantes peut les aider à mieux se protéger.
Tout suicidant doit être systématiquement adressé et pris en charge aux urgences médicales.
En 2002, 195 000 tentatives de suicide ont été prises en charge par le système de soins et 162 000 sont passées par les urgences.
L'évaluation aux urgences s’attache d’abord à reconnaître le geste suicidaire qui n’est pas toujours évident. Poser la question de l’existence d’idées de suicide ou d’un projet suicidaire chez une personne souffrant d’une dépression n’augmente pas le risque suicidaire mais permet au contraire une meilleure évaluation.
En situation d’urgence, l'évaluation permet la reconnaissance du type d'intervention approprié. La prévention secondaire vise à stopperle processus suicidaire engagé dans sa phase active (suicidaires) et la prévention tertiaire s’attache à éviter la récidive suicidaire chez des sujets qui sont passés à l’acte (suicidants).
L’évaluation aux urgences est triple : somatique, psychologique et sociale. Elle permet d'éliminer un risque vital et de poser les orientations nécessaires.
Les critères d’hospitalisation d’un suicidant en psychiatrie reposent sur la présence de facteurs de risque, un niveau d’urgence et de danger élevé, l’absence de facteur de protection et l’appartenance à un groupe d’âge à risque. Le plus souvent contractuelle, l'hospitalisation peut aussi être sous contrainte en présence de troubles du raisonnement, d'urgence et dangerosité réelle et d'opposition aux soins.
Le lieu d’hospitalisation en milieu psychiatrique n’est pas univoque : service de psychiatrie traditionnel, centre d’accueil et de crise, unités d’hospitalisation dédiées.
Dans tous les cas une réévaluation à distance avec relai aux interlocuteurs habituels (médecin traitant, psychiatre, psychothérapeute, services sociaux, ...) est nécessaire.